«Les yeux
des racines»
pierre
noire sur fibre de tapa banian - 65 cm x 147,5 cm
Située
dans le groupe sud de l’archipel le plus éloigné de tout continent, HIVA
OA est la deuxième plus grande île des Marquises. J’y ai séjourné 6 mois dans le cadre d’une résidence artistique
conventionnée par les communes de Pont-Aven et d’Atuona, pendant laquelle
j’ai développé un travail de dessin (stylo à bille, pastel, pierre noire). Je me suis d’abord intéressé au Banian, arbre sacré dont le réseau
labyrinthique de racines aériennes m’évoquait les mystères de la culture
marquisienne. Arrivés dès le 10e siècle sur ces îles vierges, ces
insulaires habitués aux grandes migrations n’ont cessé de développer une
civilisation d’une grande richesse qui reste encore largement à découvrir. C’est ce qui m’a poussé à donner aussi une orientation sociale à plusieurs
projets artistiques : tout d’abord la réalisation d’une série de 200 dessins
de la ville d’Atuona et de ses habitants, qui a fait l’objet d’une
exposition « Katahi » (« Ensemble »), puis une seconde sériede dessins sur le thême des
maisons marquisiennes « Fa’e o te Fenua Enata » (« Maisons de la Terre des Hommes ») et enfin
l’organisation, pour les enfants, de trois ateliers de peinture et de dessin
au sein du centre culturel Paul Gauguin.
Les deux expositions à Riec sur Belon (du 28/05/2010 au 03/06/2010) et à
Pont-Aven (du 04/06/2010 au 13/06/2010) ont retracée ces expériences autant
plastiques que culturelles et sociales.
Rivière
et chevaux à Atuona - Hiva Oa Route de Hanatetena - Tahuata Tiki souriant -
Hiva Oa
contact :
isidorederais@gmail.com
«
bAniAn » « A ŌA »
«
Banian 6 » stylo à bille sur papier canson - 30 cm x 24 cm
Je
cherche toujours à exprimer plastiquement les ambivalences, les
paradoxes, les extrêmes opposés car ils symbolisent pour moi les aspects
contradictoires de la vie en général. Les Marquises sont issues d’anciens énormes volcans surgis de l’océan,
des terres isolées encore pleines de secrets et d’interrogations que
guettent cependant les dangers de la société de consommation. Le Banian m’a immédiatement fasciné : cathédrale végétale et
tentaculaire, sa forme même suscite le mystère ; on ne s’étonne pas
qu’il soit sacré pour les Marquisiens. Il signifie « la Vie » ou encore
« le Souffle de Vie » à savoir que toutes les étapes de la vie s’y
déroulent : les femmes y accouchent, on y pratique les tatouages qui
symbolisent les différents stades de l’évolution d’un être, adolescence,
âge adulte, victoires après des batailles, cultes rituels,
intronisations, sacrifices pour motifs divers ou mort naturelle. Après l’avoir étudié rigoureusement par le dessin, j’ai commencé à le
manipuler sur de plus grands formats en y dissimulant une autre figure
emblématique des Marquises : le tiki. Ce qui m’a amené à une recherche
propre sur le tiki en m’attachant aux pleins et aux vides, y intégrant
la couleur dans une confrontation de traits et de bandes. Je me suis
penché aussi sur les motifs marquisiens (tatouages, ornementations) : l’installationde
galets au sol représente un lézard. Je me suis intéressé au bois du
Banian, je voulais prendre contact avec la pierre. Les galets incarnent autant l’océan que la montagne, ils dégagent une
présence, ils vibrent dans leur immobilité. Ceux-ci sont utilisés dans
les fours marquisiens pour leur qualité réfractaire. J’ai cherché ceux d’une teinte rougeâtre.
«
KATAhi » « ensemble »
Visite de l’exposition par les élèves de 4ème du collège St Anne - Hiva
Oa
«
Ensemble » est une série de vues d’Atuona et de portraits de quelques
habitants. Une des manières les plus simples de rendre une image demeure le dessin
noir et blanc. L’emploi du format A4 et du stylo bille noir est né d’une volonté de
poétiser ces produits industriels et d’offrir aux visiteurs une grande
quantité de dessins. Les dix colonnes de tikis au pastel sont celles de l’atelier des
Tropiques. Ce bungalow est mon lieu de vie : j’ai été invité sur votre île, à mon
tour de vous convier chez moi, baigné d’images de Hiva Oa.
«
Katahi » o titahi haka’itetina o te tau ata o Atuona me tahipito ’enata
tumu.E ’i’o te patutina ’ima o te ata ke’eke’e me te ma’ita titahi
hakatu meita’i nui no teha’amau ia ia. U ha’ahanatia e au te paka hamani
A4 me te patu ahí ke’eke’ no te ha’akanahau tenei tau ha’ina hou, me te
tu’uatu titahi tau ti’ohitina ata na te tau manihi’i. Na ’onohu’u pou
tiki i penitia “pastel”, o titahi taha pe’autia “Atelier des
Tropiques”.Io tenei fa’e o to’u noho : u veva’otia au no te he’emai io
’otou, tenei na’u te ke’e’e ia’otou io’u me te uhiatu au ia ’otou me te
tau ata o HIVA OA.

Comme dans toutes sociétes humaines, la maison est
le foyer, le creuset où s’organise la famille. Dessiner la maison est comme faire le portrait d’une famille. Je
donnais ensuite le dessin en échange de ce que les habitants
voulaient bien m’offrir (un repas, une boisson, des denrées...
l’argent n’étant pas en jeu). L’intérêt de ce projet réside autant dans le dessin final que dans
la démarche dans son ensemble basée sur la générosité et le lien
social. Je renouais également avec l’idée médiévale de l’artiste « invité du
banquet » : en échange des divertissements qu’il offrait, il était
convié à la table. Peut-être certains dessins seront-ils accrochés à l’intérieur de la
maison, ce qui répond à ma volonté d’exposer mes oeuvres. De ce projet je garde des traces photographiques que j’édite sous
forme de leporello, un format qui permet à la fois la consultation
tel un livre et le déploiement tel un paysage. Enfin, l’aspect documentaire de ce travail m’incite à le penser pour
d’autres maisons d’autres régions du monde.

Mes
diverse interventions auprès des établissements scolaires
(particulièrement primaires et maternelles) m’ont amené à repenser ma
pratique du dessin et de la peinture. Pour intégrer l’enfant dans un processus de création il faut savoir être
simple. HivaOa est une île volcanique, j’ai trouvé dans le sujet du volcan un
essentiel susceptible d’interpeller les élèves. J’ai ensuite moi-même
exploré ce thême au pastel et à l’encre sur de grands formats dans un
souci de simplification extrême faisant apparaître des motifs. Les multiples combinaisons de couleurs et de formes donnèrent naissance
à un vocabulaire plastique. L’affichage de ces «papiers-peints» sur la «Maison du jouïr»
(reproduction de l’atelier de P. Gauguin) au sein du centre culturel d’Atuona
créait un environnement propice à l’imagination, idéal pour
l’organisation d’ateliers de peinture et de dessin destinés aux enfants. Grâce au soutient du corps enseignant j’ai pu mettre en place 3 espaces:
peinture au pochoir qu’on accrochait à la suite de mes papiers-peints
sur la Maison du jouïr, reproduction de motifs marquisiens avec des
gallets (faisant echo à une de mes installation à l’entrée du musée) et
coloriage géant à la craie sous «l’Atelier des Tropiques» mêlant des
motifs marquisiens à des super-héros de bandes-dessinées. L’investissement des enseignants et la motivation des enfants ont fait
de cet évènement un joyeux succès et du centre culturel un lieu de
créativité.
Ateliers
pour enfants: peinture, dessin, coloriage, installation

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