Pas un homme ne peut passer une nuit sur l’île Tabou… et vivre.
A vingt kilomètres de Papeete, à quelque distance de la côte de Papenoo, dans le lagon de Haapape, se trouve l’île Tabou.
Les femmes peuvent parler de la beauté et du calme de l’île, de ses arbres et de ses fleurs, et du balancement brillant de ses palmes sous la lumière de la lune.
Elles peuvent parler de la douceur de son sable, et du bleu de ces criques.
Car les femmes ne voient pas de tupapau.(fantôme), et n’ont jamais eu à craindre la visite d’une nuit, dans l’île Tabou.

Les enfants, pendant la journée, montés sur leurs pirogues, traversent le lagon, pour profiter des plaisirs qu’ils peuvent trouver dans l’île interdite.
Mais au coucher du soleil, ils doivent rapidement repartir pour Papenoo car ils n’ont aucune envie de rencontrer le tupapau de l’île Tabou.
La légende raconte que, dans l’ancien temps, une jeune fille tahitienne rencontrait de nuit son fiancé dans l’île Tabou.
Et main dans la main, ils se promenaient dans toute l’île, sur ses plages, sous ses arbres. Une nuit, le garçon ne vint pas au rendez-vous, et depuis ce jour, elle ne le revit plus.
Et la jeune fille, cœur brisé, promit de ne jamais quitter l’île jusqu’à ce qu’il revînt vers elle.
Et depuis ce jour, les Tahitiens disent que par les nuits de lune, si l’on regarde au-dessus du lagon vers l’île Tabou, de bons yeux peuvent voir le merveilleux tupapau, vêtu seulement d’un pareo de tapa blanc, errant sur la plage ou assis sous une palme ou sous un tumu hotu (arbre fruitier), attendant son amoureux.
Mais… Que les dieux aident l’homme qui se rend au rendez-vous !
Beaucoup d’hommes, connus pour leur bravoure, attirés à l’idée d’un merveilleux tupapau amoureux qui la nuit hante l’île, s’y sont aventurés malgré le conseil de la légendaire rumeur.
Et leur imprudence leur a coûté la vie.
Car au matin,
Après leur nuit de veille,
Ils ont été retrouvés,
Morts !
Et les indigènes chuchotent,
Quand ils sentent l’étrange légèreté du corps épuisé,
Que la victime a été aimée à mort par le tupapau de l’île Tabou.

 

Illustration : Peinture à l'huile (30X40 cm) par Claudia Gacek : "Le Motu Tapu"